Le problème auquel sont confrontés ceux qui voudraient voir émerger une véritable architecture de la gouvernance mondiale est que la réalisation de ce que l’on rêve de bâtir ne ressemble en rien à ce qu’on pourrait éventuellement construire, étant donné les contraintes, les limites et les obstacles qui sont les nôtres et qu’on l’on est souvent tenté d’occulter ou de minimiser. Donc, plutôt que de rêver d’une démocratie mondiale chimérique ou d’un gouvernement mondial hypothétique, il nous semble beaucoup plus raisonnable d’avancer progressivement, en définissant les problèmes et les objectifs pour envisager le type de structures et d’institutions susceptibles d’engager des actions vigoureuses pour solutionner les problèmes donnés, et précis. Ce n’est qu’en avançant de la sorte que pourra éventuellement se dessiner une «gouvernance mondiale» digne de ce nom, et dont il est impossible d’envisager à l’avance ce à quoi elle pourrait ressembler puisque, par définition, elle épousera la forme des objectifs qu’elle se fixe au fur et à mesure.
Cette approche ne ressemble en rien à celle des architectes de la Société de nations après la Première Guerre mondiale, ou de l’ONU après la Seconde, ni même, en remontant plus loin, au rêve internationaliste qu’entretenait Henri IV avec son «Grand Dessein» pour l’Europe. D’un point de vue philosophique, notre approche serait plus proche de celle qui fut adopté par Jean Monnet et les premiers architectes de la future Union Européenne.
Il paraît nécessaire, avant d’aborder des problèmes d’ordre concrets, de donner à ce plan pour une architecture globale une structure de base, sorte de charpente qui guiderait la mise en œuvre du chantier. Pour accomplir la construction d’un tel régime de gouvernance, on peut envisager une méthode visant à définir à la fois des objectifs (à travers une Constitution mondiale), des dispositifs pour les réaliser, et une éthique (Charte des responsabilités humaines par exemple) servant de fil conducteur à l’entreprise.
L’idée d’une «constitution mondiale» est basée sur quelques concepts précis, notamment dans un domaine délaissé auparavant par les «relations internationales», celui de l’éthique. Une telle structure pourrait être basée sur quatre piliers:
Vaincre la pauvreté: Devoir de vaincre la pauvreté et de sauvegarder notre Terre pour nous et pour nos enfants,
Établir la Dignité: La dignité de chacun implique qu’il contribue à la liberté et à la dignité des autres,
Établir la Paix et la justice: Une paix durable n’est pas établie sans une justice respectueuse de la dignité et des droits humains,
Assurer la légitimité du pouvoir: L’exercice du pouvoir n’est légitime que lorsqu’il est mis au service de tous et contrôlé par les peuples.
En somme, nous devons réaffirmer une fois de plus le principe fondateur de la communauté internationale: notre monde appartient à tous et aucun gouvernement ni institution ne peuvent se prévaloir de l’autorité sans la volonté démocratique des tous les citoyens.
La Charte des responsabilités humaines invite à faire face aux défis du 21e siècle en définissant un nouveau pacte social à travers une éthique universelle, fondée sur le principe de la responsabilité, qui complète la Déclaration universelle des doits de l’homme et la Charte des Nations Unies.