Le changement climatique a fait couler beaucoup d’encre, entre alarmisme et scepticisme, les débats se sont fait nombreux. La polémique s’est surtout cristallisée, à la fin du XXe siècle, sur les origines anthropiques ou non de ce changement. Depuis, un consensus s’est créé autour de la reconnaissance du lien avéré entre la concentration de CO2 dans l’atmosphère et le réchauffement du climat. Aujourd’hui, à l’exception de quelques climato-sceptiques qui le réfutent encore, l’impact des activités humaines sur la concentration de CO2 dans l’atmosphère est reconnu, même s’il est également admis qu’une partie de la variabilité climatique est d’origine naturelle.
Le changement climatique n’est pas simplement un concept, une idée abstraite, il se traduit concrètement, au cœur de la vie quotidienne de nombreuses populations. En effet, les pluies auparavant régulières ne le sont plus autant, les sécheresses autrefois exceptionnelles ne le sont plus tant que ça ; les saisons semblent s’être déréglées. C’est pourquoi le terme de « changements climatiques », au pluriel, est parfois préféré. C’est ainsi par exemple que l’UNFCCC : United Nations Framework Convention on Climate Change, est traduit en français par CCNUCC : Convention-Cadre des Nations Unies sur les Changements Climatiques. Référence en la matière, le GIEC (Groupe d’Experts Intergouvernemental sur l’Evolution du Climat), créé par l’Organisation météorologique mondiale (OMM) et le Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE) en 1988, reprend également à son compte ce terme puisque son dernier et quatrième rapport d’évaluation technique s’intitule « Changements climatiques 2007 » et le définit comme la « variation de l’état du climat, que l’on peut déceler (par exemple au moyen de test statistiques) par des modifications de la moyenne et/ou de la variabilité de ses propriétés et qui persiste pendant une longue période, généralement pendant des décennies ou plus. Les changements climatiques peuvent être dus à des processus internes naturels, à des forçages externes ou à des changements anthropiques persistants dans la composition de l’atmosphère ou dans l’utilisation des terres. […])
Ces changements de climat ont de nombreux impacts pour l’homme et ses activités. L’une des premières conséquences directes est la montée du niveau moyen de la mer due à la fois à la dilatation des océans et à la fonte des glaciers ; elle représente une menace directe à la survie de certaines îles du Pacifique à l’image de Tuvalu. La modification des régimes de précipitations représente une autre de ces conséquences, avec une imprévisibilité des pluies qui représente une menace importante pour la sécurité alimentaire. Bien qu’encore sujet à polémique, l’augmentation de la fréquence des catastrophes naturelles telles que les cyclones, inondations ou glissements de terrain serait également lié aux changements climatiques. C’est autour de ces phénomènes qu’est naît le débat autour des « réfugiés climatiques », concept autour duquel de nombreux enjeux se négocient.
Deux volets d’action peuvent être distingués dans la lutte contre le changement climatique et ses conséquences, il s’agit de l’atténuation et de l’adaptation. L’atténuation concerne les mesures qui visent à « réduire les sources ou augmenter les puits de gaz à effet de serre »[[Glossaire du GIEC (Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat – IPCC)]], l’adaptation de son côté se réfère à « l’ajustement des systèmes naturels ou humains en réponse à des stimuli climatiques présents ou futurs ou à leurs effets, afin d’atténuer les effets néfastes ou d’exploiter des opportunités bénéfiques »[[Ibid.]] .
Atténuation
Au niveau international, le Protocole de Kyoto est une initiative majeure du volet atténuation. Ce traité international représente un pas important car il fixe des objectifs chiffrés et contraignants pour la réduction des émissions de six gaz à effet de serre : le dioxyde de carbone (CO2), le méthane (CH4), l'oxyde nitreux (N2O), les hydrofluorocarbones (HFCs), les hydrocarbures perfluorés (PFCs), et l'hexafluorure de soufre (SF6). Il a été signé le 11 décembre 1997 lors de la troisième Conférence annuelle des Parties à Kyoto au Japon, il est entré en vigueur le 16 février 2005 et a été ratifié par 168 Etats (en 2010). L’objectif global est de réduire entre 2008 et 2012 de 5,2% par rapport au niveau de 1990, les émissions des gaz à effet de serre. Chaque pays dit de l’ «Annexe B », constitué majoritairement de pays développés, possède son propre objectif de réduction d’émissions. Pour soutenir les Etats dans cette démarche, le Protocole de Kyoto met en place trois mécanismes : un système d’échange de permis d’émissions, le Mécanisme de développement propre (MDP) ou Clean development mechanism (CDM) et le mécanisme de Mise en œuvre conjointe (MOC) ou Joint Implemenation (JI). Le MDP permet à des pays de l’Annexe B de financer des projets de réduction d’émissions de gaz à effet de serre et, sous certaines conditions, d’en obtenir des crédits carbone qui peuvent être vendus ou utilisés pour compenser certaines émissions. Le MOC permet la même chose pour des projets situés dans des pays de l’ Annexe B.
Des initiatives sont également prises aux niveaux régional et national. L’Union européenne s’est par exemple engagée sur les objectifs dits des « trois fois vingt », il s’agit d’ici 2020 de réduire de 20% (voire de 30% en cas d’accord international) ses émissions de gaz à effet de serre par rapport au niveau de 1990, d’atteindre une part de 20% d’énergies renouvelables dans sa consommation d’énergie totale et d’améliorer son efficacité énergétique de 20%. Elle s’est dotée d’instruments pour atteindre ses objectifs, notamment à travers son Paquet Energie-Climat qui crée trois mécanismes de coopération : celui des transferts statistiques, celui des projets communs, et celui des régimes d’aide communs. Même si à ce jour (2012) aucun n’a encore été utilisé, un autre volet de l’action européenne fonctionne avec un certain succès. Il s’agit du SCEQE (Système Communautaire d’Echange de Quotas d’Emission) ou EU ETS (European Union Emissions Trading System). Ce système met en place un marché de quotas carbone à l’échelle européenne. Il concerne environ 12 000 installations de l’Union Européenne et couvre environ 40% de ses émissions de gaz à effet de serre. A chaque début d’année les installations concernées se voient remettre une certaine quantité de quotas carbone correspondant à leurs émissions de gaz à effet de serre autorisées. A chaque fin d’année elles doivent remettre le nombre de quotas correspondant à leurs émissions (un quota est équivalent à une tonne de CO2 équivalent émise), si elles émettent plus elle doivent acheter des quotas, si elles émettent moins elles peuvent en vendre. Pour l’instant la grande majorité des quotas sont donnés aux installations, mais à partir de 2013, 50% des quotas seront mis aux enchères avec pour objectif d’atteindre les 100% en 2027.
Adaptation
Le travail d’adaptation consiste à prendre en compte dès aujourd’hui les impacts des changements climatiques dans les décisions et activités actuelles, afin d’augmenter la résilience des populations dans le but de réduire l’impact des changements climatiques sur leurs moyens d’existence. Les actions dans ce domaine sont très diversifiées et peuvent être menées dans les pays développés et dans les pays en développement, même si les populations les plus vulnérables se situent dans ces derniers. Il s’agit par exemple de développer l’agroforesterie, de sensibiliser les populations agricoles à l’imprévisibilité des précipitations et de développer des bonnes pratiques en conséquences, de diversifier les sources de revenus, de réhabiliter des mangroves comme barrières naturelles et comme puits de CO2, ou encore de repenser l’approvisionnement en eau des zones qui dépendent principalement de glaciers en voie de disparition.
Ces mesures d’adaptation ont un coût important. Même s’il est difficile de les chiffrer exactement, une étude de la Banque Mondiale[[The Costs to Developing Countries of Adapting to Climate Change - New Methods and Estimates, The Global Report of the Economics of Adaptation to Climate Change Study, Consultation draft, World Bank, 2010.]] estime que pour une augmentation de la température de 2°C d’ici 2050, les coûts d’adaptation représenteraient de 75 à 100 milliards de dollars par an entre 2010 et 2050. Dans les faits, les financements pour l’adaptation sont bien loin du compte. Au niveau international existent notamment le Fonds d’Adaptation lié au Protocole de Kyoto, dont le financement est principalement assuré par le prélèvement de 2% des crédits carbone générés par les projets MDP ; et trois fonds gérés par le Fonds pour l’Environnement mondial (FEM) qui financent des projets d’adaptation à hauteur de 400 millions de dollars[[Financer l’adaptation au changement climatique, FEM, 2011]]. (en 2011).
D’autres initiatives existent pour financer à la fois des actions d’atténuation et d’adaptation. Il s’agit par exemple du Fonds Vert pour le Climat, créé à Cancun en 2010, ou des «Fast Start Finance » qui représentent l’engagement pris par les pays développés à Copenhague en 2009, à fournir 30 milliards de dollars de financement nouveaux et additionnels entre 2010 et 2012. Mais dans les faits, ces initiatives tardent à se mettre en place, et la gouvernance et les critères d’attribution des fonds soulèvent de nombreuses problématiques.
A la recherche d’une coopération mondiale
Les fonds pour l’atténuation et l’adaptation ne sont pas les seuls grands absents de la scène internationale, aujourd’hui la volonté politique des Etats fait également défaut. En effet, le régime climatique instauré par le Protocole de Kyoto expire en 2012. La 15ème Conférence des Parties à Copenhague en 2009 devait être la pierre angulaire du régime post-2012, mais elle s’est soldée par un échec. La 17ème Conférence des Parties à Durban en 2011 a vu un semblant de consensus se dessiner avec l’adoption d’une feuille de route d’ici à 2015 pour l’établissement d’un pacte global de réduction des émissions de gaz à effet de serre qui devrait entrer en vigueur en 2020. Cet accord rassemble pour la première fois tous les pays dans la lutte contre le changement climatique, mais il n’est juridiquement pas contraignant. Cette feuille de route prévoit également une possible prolongation du protocole de Kyoto pour une période de 5 ou 8 ans, soutenue par l’Union Européenne mais rejetée notamment par le Canada, la Russie et le Japon. Face à ce défi global, une réponse efficace ne peut se faire que si elle provient d’une coopération mondiale concertée mais aujourd’hui celle-ci semble en berne, ah si seulement le changement climatique pouvait porter une moustache… [[Dans son article « If only gay sex caused global warming », paru dans le Los Angeles Times, le 2 juillet 2006, Daniel Gilbert explique que le cerveau humain réagit aux menaces qui possèdent quatre caractéristiques. La première est qu’elle soit d’origine humaine (d’où le port de la moustache), la seconde est qu’elle viole notre morale, la troisième est que la menace soit imminente, la dernière est qu’il faut que les changements soient perceptibles ; soit quatre caractéristiques que ne possède pas le changement climatique et qui pourrait expliquer que si peut soit fait pour lutter contre.]]